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Roman > Chap4 : Place Clichy


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A mesure que nous nous éloignions, je me sentais de plus en plus dégoûté et profondément désespéré. J'étais au chômage depuis plus d'un an et je n'avais plus aucune idée d'un travail que j'aurai pu trouver. Les chefs ou les petits patrons comme Cyril étaient à exclure de mon monde. Je regrettais de ne pas avoir eu assez de cran pour le corriger comme l'avait fait Hakim.

En fait, moi seul aurait dû régler son compte à ce jeune prétentieux. Mais je suis sans doute trop intégré à un système qui exclu ce genre de réaction. J'accepte et je respecte tous ces petits pouvoirs à la con. Je me laisse humilié par ceux qui peuvent me donner du travail. Ils ont le bon rôle parce qu'étant chômeur on n'a pas vraiment le choix. On se présente à eux avec l'espoir de sortir d'une situation qui nous pèse et menace de faire de nous des exclus. C'est la grande peur de notre époque et ils en font l'instrument de leur domination.

Je doutais, dans ces conditions, que l'égalité des hommes soit une réalité du monde du travail, et je ne pouvais accepter mon manque de réaction lorsque Cyril avait tenté de me rabaisser. Hakim, avec son tempérament de voyou, ne s'était posé aucune question. Pour lui, tout se règle d'homme à homme et par la force des poings. Il s'était jeté sur Cyril sans aucun égard pour sa position et lui avait infligé une sévère correction. Il avait fait ça pour moi. Je lui en étais reconnaissant mais j'étais également en proie à un grand sentiment de colère. Une colère que je sentais bouillonner en moi contre le monde entier. Il m'aurait fallu tout casser et mettre le feu à la terre entière pour m'en débarrasser. Je restais silencieux. Même pour Hakim, ma reconnaissance se serait transformée en expression de ma colère si j'avais ouvert la bouche. Tout en marchant, je serrais les poings dans mes poches tandis qu'il vérifiait le bon état de ses membres. Sa main droite lui posait quelques soucis apparemment. Je l'entendis dire : "Putain, j'me suis niqué le poignet sur ce salaud", mais je ne répondis rien. Moi, il me semblait que ma vie entière avait été niqué au contact de ce salaud.

Aux abords de la place Clichy nous avons entendu quelqu'un crier derrière nous. Nous nous sommes retournés. C'était la secrétaire de Cyril.
- Qu'est ce qu'elle nous veut celle-là ? m'a demandé Hakim.
- J'en sais rien.
Elle nous a rejoint :
- Il m'a viré.
- Qu'est ce que tu veux qu'ça nous foute ? lui a dit Hakim ( il portait sur la joue et sur le cou, quelques marques de griffures qui ne pouvaient provenir que d'elle ).
Elle ne lui répondit pas. Elle tentait de retrouver son souffle.
- Comment tu t'appelles ? lui ai-je demandé.
- Louise.

Son apparition si soudaine et si inattendue me redonnait espoir mais je ne savais en quoi exactement. Elle n'avait pas l'air très déçue d'avoir été virée. Nous n'étions qu'à quelques mètres d'un café, dans la rue Biot, je crois. Je lui proposais de prendre un verre avec nous.


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