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1 : Nouvelle > Amsterdam (2eme Partie).

 

Il est près de minuit. Les rues commencent à se vider. Les touristes se font plus rares. Nous passons plusieurs rues et encore des ruelles, puis, à nouveau un canal. J'ai décidé de succomber également aux invites érotiques que nous envoie le quartier rouge. Mais, dans les vitrines, je ne vois plus que des femmes à l'allure provocante et vulgaire, dont les charmes ne justifient pas une ponction du pécule destiné à mon voyage.

Dominique, tandis que je cherche, commence à s'impatienter. Cette soirée a, d'après lui, légèrement dérapée. C'est n'importe quoi, vous êtes en train de tous partir en couille les mecs. Il a sans doute raison mais je ne veux pas encore devenir raisonnable. Cependant le temps passe et plus aucune prostituées n'éveillent en moi l'ardent désir qui me possedait il y a peu. Nous pensons bientôt rentrer lorsqu'enfin, dans une rue beaucoup plus animée que celle que nous venons de quitter, je la vois.

Elle est assise sur un tabouret de bar, dans un box, les bras croisés. Elle pose sur le petit monde qui l'observe un regard indifférent. Pourtant, ils sont nombreux les yeux qui mattent avec concupiscence. Je ne me pose aucune question. J'accélère mon pas, je me dirige droit vers elle.

Me voyant arriver, elle ouvre sa porte de manière à ce que, dans l'entrebâillement, nous puissions nous parler. D'abord en anglais mais, après quelques phrases, elle se rend compte que je suis français et me parle dans ma langue. Je dois avoir un trac terrible.

En n'importe quelle autre occasion j'aurai souhaité l'aborder et elle m'aurait tout autant intimidé. Comparée à toutes les prostitués que j'ai eu l'occasion d'observer jusqu'à présent, elle est d'un naturel très surprenant. S'il me fallait garder trois mots pour la définir, je dirais : belle, naturelle et simple. Ces trois adjectifs suffisent en général à me faire succomber aux charmes d'une femme.

C'est la première fois de ma vie que je vais faire l'amour avec une femme dont, dix minutes auparavant, je n'imaginais même pas encore l'existence. Il faut évidemment que je sache combien cela va me coûter. Elle m'annonce deux tarifs ; l'un pour une fellation et l'autre pour la fellation et l'amour. La seule chose que j'entends, et qui m'intéresse, est que ces prix sont dans mes moyens. Je suis d'accord pour lui donner l'argent qu'elle demande. Elle m'ouvre grandement sa porte.

A l'arrière du box, on accède à un couloir de quelques mètres. Elle me dit d'avancer et d'ouvrir la troisième porte sur ma droite. La timidité me rend un peu pataud et j'en deviens imbécile. Il me faut faire un gros effort pour repérer la troisième porte à droite dans un couloir. L'envie de faire demi-tour me traverse l'esprit mais il est trop tard. Il faut maintenant que j'aille jusqu'au bout.

C'est une petite pièce sans fenêtre, très propre. Il y a un lit contre le mur à ma gauche ; une armoire métallique en face de moi et, à ma droite, une table et un miroir. Je m'assieds sur le lit, car il me semble que mes jambes ne seront bientôt plus capables de me porter. Elle est entrée juste après moi et s'est appuyée sur la table. Elle me regarde, devine ma gêne et me sourit très gentiment. Sans doute pour me mettre à l'aise, elle me tend sa main et me dit : " je m'appelle Tina".

Je trouve alors assez d'aplomb pour la prendre dans la mienne et lui dire mon prénom. Ensuite, elle me dit de sa voix douce, sur un ton d'hôtesse d'accueil, qu'il faudrait que je lui donne l'argent maintenant. C'est vrai, je l'avais presque oublié : il faut payer avant. Combien veut-elle ? Je ne me souviens déjà plus des tarifs.

Puisque je suis là, je veux tout faire avec elle, alors je lui donne le maximum. Les billets disparaissent entre ses mains ; sans que je ne sois capable de de dire ce qu'elle en fait ; elle les escamote promptement.

Bêtement, je lui demande s'il faut que je me déshabille complètement. Elle me dit avec un charmant accent, dont je peine à définir l'origine : C'est comme tu veux. Pour elle, la question est toute réglée puisqu'elle ne porte qu'une culotte et un soutien-gorge, ce qui, pour l'activité qu'elle exerce, correspond à une tenue de travail simple et correcte.

Tout en retirant mes vêtements, je commence à lui expliquer que c'est la première fois et, qu'en plus, je me suis arrêté tout à l'heure dans un cofee-shop avec mes amis. Evidemment, rien ne l'étonne, elle m'écoute en attendant patiemment que je finisse de me dépatouiller avec mon pantalon et mes sous-vêtements.

Lorsque je suis enfin nu, que mon corps entier éprouve la fraîcheur de la pièce où nous nous trouvons, elle me dit de me coucher sur le lit. Elle attrape alors mon sexe et m'enfile, en véritable experte, un préservatif. Avant de se mettre à l'oeuvre elle me fait les dernières recommandations : lorsque j'aurai envie d'elle, je le lui dirai et je viendrai sur elle. Il n'y aura pas d'autre position. Suis-je en mesure de dire quelque chose ? Non, même si je déplore l'absence de spontanéité dans l'acte sexuel : c'est elle qui fixe les règles.

Sa bouche s'est déjà emparée de mon sexe. Je ferme les yeux pour me laisser emporter par le plaisir. Je les ouvre pour voir son corps courbé à la hauteur de mon bas-ventre ; son dos, la courbe de ses hanches, son cul également : tout cela ne fait qu'accroître un sentiment de félicité et m'entraîne vers la jouissance.

D'un geste je l'arrête car mon excitation est à son comble. J'éprouve, plus que tout, l'envie de la pénétrer maintenant. Elle se couche sur le dos à mes côtés, me fait attendre le temps de se mettre une pommade lubrifiante, puis me dit : Tu peux venir. Toujours cet accent si séduisant.

Je suis sur elle. Mon sexe est entré avec force ; j'ai vu qu'elle a fait une petite grimace ; je crains qu'elle ait eu mal mais il faut continuer : mon plaisir est proche. Je la regarde. Elle ferme les yeux. Toujours plus fort. Je ne suis pas loin de me libérer mais rien ne vient. Je continue encore. Encore. Mais quelque chose ne va pas.

Ce n'est plus la peine, je n'y parviendrai pas. J'arrête, je me retire. Grand silence. Il y a comme un trouble entre nous. Elle se lève et va s'asseoir, sans rien dire, sur un bidet que je n'avais pas encore remarqué dans un coin de la pièce.

J'ai le sentiment d'un véritable désastre. Tina fait un petit tour dans la pièce, à la recherche d'une chose que j'ignore, et je la regarde. Je m'aperçois tout à coup qu'elle n'a jamais ôté son soutien-gorge.

Cette parure symbolise toutes les parties d'elle auxquelles je n'ai pu accéder car, outre ses seins, c'est sa possession totale qui m'a fait défaut. Je comprends mieux à présent quel métier elle fait. Bien sûr, je suis déçu, mais je n'éprouve pas le sentiment d'avoir été floué. Au contraire, cela me rassure de voir qu'avec mon argent je n'ai finalement pas acheté l'essentiel.

En réalité, les meilleurs moments que l'on passe avec une prostituée sont les quelques minutes avant et après l'acte pour lequel on paie : les moments où l'on parle avec elle. Je pense que beaucoup d'hommes doivent les voir pour cela. Tina est parfaite dans ce rôle, elle comprend ce qui se passe et elle sait quoi dire exactement. Elle met fin à mon trouble en me disant : Certains hommes aiment aller voir les putes, parce que c'est leur fantasme de payer une femme, mais pour d'autres c'est différent, ils ne sont pas fait pour ça.

Elle m'explique ainsi d'une manière simple et gentille mon désarroi et ma déception d'une première fois avec une pute. Ensuite, elle me demande si mon séjour se passe bien, si j'aime Amsterdam. Nous parlons de la ville et un peu d'elle pendant que je me rhabille. J'apprends qu'elle est flamande et qu'avant de faire ce métier, elle était étudiante. Pourquoi a-t-elle choisi de se prostituer ? Pour l'argent.

J'aurais aimé rester plus longtemps avec elle mais son temps est compté. Elle travaille. Il y a encore des clients à recevoir.

En partant, j'allais fermer la porte de la petite chambre où nous nous trouvions, mais elle m'a demandé de la laisser ouverte. Le poste de radio se trouve à l'intérieur et elle aime entendre la musique au fond du couloir, tandis qu'elle se trouve dans sa vitrine. Je reconnais alors une chanson populaire que toutes les jeunes filles adorent. C'est une belle chanson, je lui dis. Oui. Un dernier sourire. Tina me l'offre. C'est fini. Je disparais.

Lorsqu'elle aura fini son travail, Tina prendra un taxi pour rentrer chez elle, car le quartier rouge est peu sûr la nuit.

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