Finalement, je suis
rentré seul. Je n'ai plus entendu parlé de Louise
pendant 4 ou 5 jours. Je n'ai jamais su ce qu'elle était
devenue durant tout ce temps. Elle avait peut-être vécu
avec Thibault et Marie, ils ont peut-être fait ménage
à trois avant que Louise ne me revienne. Cette période
de sa vie demeure un mystère pour moi car elle n'a jamais
voulu répondre à mes questions. Lorsque je lui ai
demandé pourquoi elle avait fini par reprendre contact avec
moi, elle m'a dit que je lui avais manqué. C'est comme ça,
m'a-t-elle affirmé, lorsque je suis avec toi j'ai parfois
envie de disparaître et lorsque je suis sans toi, je pense
que tu me manques.
Tu penses que je te manque ou je te manque vraiment, ce n'est pas
la même chose tu sais. Non, tu me manques vraiment, m'a-t-elle
répondu.
- Ah bon ! Il vaudrait mieux en être sûre parce que,
moi, je n'ai pas que ça à faire : courir après
toi ou bien t'attendre.
Pour toute réponse, elle s'est contentée de baisser
les yeux et de reprendre son air songeur. Elle est restée
un long moment sans rien dire, si bien qu'il m'a fallu poursuivre
mon discours. Je n'avais moi-même pas les idées vraiment
claires. J'étais partagé entre le bonheur que me procurait
son retour et les reproches que j'avais à lui faire.
Les reproches ont évidemment pris le dessus et Louise m'a
écouté lui dire, pendant plus d'une heure, que je
ne comprenais rien à sa manière d'agir, que pourtant
je l'aimais, qu'elle ne se rendait pas compte de tout ce qu'elle
gâchait entre nous, qu'il fallait qu'elle me parle, que, sinon,
je préférerais qu'il n'y ait rien entre nous.

Envoyer
un mail à l'auteur | haut de page
|
Rien entre nous, cela ne voulait rien dire bien entendu. Nous n'étions
pas à une période où je pouvais faire le vide
par une décision. Le lien qui nous unissait était
imperceptible mais si solide qu'il se trouvait là, indépendamment
de notre volonté, comme quelque chose que nous ne pouvions
rompre, ni elle ni moi. Cependant, il agissait sur nous de manières
différentes. Pour Louise, c'était un élastique,
comme ceux que s'accrochent aux pieds les gens en mal de sensation
forte avant de sauter dans le vide. Il la ramenait sans cesse vers
moi, j'étais, en quelque sorte, sa terre ferme, sur laquelle
elle ne pouvait se résigner à se poser définitivement.
Il lui fallait toujours sauter ou, quelquefois, se laisser tomber
tout simplement dans le vide. L'élastique la ramenait vers
moi, toujours. Pour moi, ce lien avait une autre forme. C'était
quelque chose de plus vital en apparence : une laisse qu'on m'avait
attachée au coup. Quoi qu'elle fasse, Louise me tenait. J'étais
à elle corps et âme. Je me résignais. L'amour
nous y oblige quelques fois. Je la regardais. Sa beauté.
Une chose toujours nouvelle pour moi. J'aimais sa peau, son visage
et ses mains. Je m'enivrais de son parfum. Certaines parties de
son corps, les plus insignifiantes en général, me
paraissaient sublime. Je lui disais qu'elle me rendait fou. C'était
vrai.
|