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Chapitre 12 : Louise

Ne pouvant plus supporter mon manque de lucidité ni la manière dont j'étais tombé sous le charme de Louise, Akhim était parti, nous laissant seuls, en tête-à-tête, la traîtresse et moi. Toute l'après-midi, nous nous sommes promenés en discutant. Nous ne parlions pas trop de nous mais de la vie en générale et de ce qu'il était bon de faire pour la rendre plus agréable. Je me souviens qu'elle me dit l'amour. Une réponse à laquelle je n'aurai pas songé, car j'avais perdu de vue cette chose essentielle ou, plutôt, j'avais fini par la classer dans les choses qui nous gâchent l'existence. J'appréciais sa manière simple d'exprimer sa pensée et même ses longs silences, lorsqu'elle trouvait de l'intérêt à ce que je lui disais. Je terminais une phrase puis j'attendais une réaction, un discours contradictoire sur lequel rebondir. Il ne venait pas. Je gagnais son regard, critique, intéressé et un sourire approbateur. Alors le sentiment d'être écouté me paraissait un peu étrange et un immense plaisir. Tout comme l'idée qu'une personne (une jolie fille en plus) s'intéressait à moi.
Je craignais de l'entendre dire, il faut maintenant que je te quitte, pour répondre à une quelconque obligation. Mais cet instant ne vint pas. Nous avons traversé la moitié de la ville à pied sans nous fatiguer. Le soir, nous étions toujours ensemble. Nous avons dîné d'une soupe phô à Belleville, puis Louise est venue chez moi. Elle s'y est plue, d'abord dans mon canapé puis dans mes bras, enfin dans mon lit.

Nous avons fait l'amour avant de nous endormir et le matin, au réveil, nous avons recommencé plusieurs fois. Entre deux coups, nous nous reposions et nous discutions. Nous avons compté les heures passées ensemble depuis notre rencontre. Vingt-six. D'habitude les gens attendent de se connaître un peu mieux, me dit-elle, alors que nous étions couchés nus, dans les bras l'un de l'autre. J'étais d'accord mais qu'avions-nous besoin de savoir exactement ? Je lui donnais un baiser. J'étais prêt à lui dresser un portrait intégral de moi, en commençant par les choses les plus importantes. C'est quoi les choses importantes, me demanda-t-elle ? D'abord les renseignements qui figurent sur mes papiers d'identité. Je lui donnais mon nom et mon prénom, qu'elle connaissait déjà (Dieu merci), puis ma date et mon lieu de naissance. Elle fut un peu surprise ; elle me croyait plus vieux. Ensuite, je fis une approximation, à mon avantage, de ma taille, car j'ai toujours trouvé que je n'étais pas assez grand. Six centimètres de plus auraient changé ma vie. J'ai, comme tout le monde, des idées toutes faites. C'est pourquoi, je trouve qu'il est bien pour un homme d'être petit - ainsi le sang circule plus vite dans le corps et ce qu'on perd en hauteur on le gagne en dynamisme - ou alors grand (entre 1m85 et 1m90) Trop grand, c'est dramatique et avoir une taille moyenne est absolument sans intérêt, toujours selon mes idées toutes faites. Donc, je rêve de mesurer un mètre quatre-vingt-cinq. De tant à autre, pour lutter contre les effets de la bière, je fais quelques exercices de musculation. Mais, pour grandir, rien ne vaut un petit mensonge. Comme nous étions couchés, je ne craignais pas de me trahir.
Cette forme de présentation, sans réellement lui permettre de me connaître davantage, amusait beaucoup Louise. Elle me fit penser à une enfant qui attend avec impatience son tour pour s'amuser lorsqu'elle me coupa. A moi maintenant, c'est mon tour de faire une présentation formelle. Formelle, ce mot, sorti sa bouche au moment où elle me paraissait une enfant, me fit l'effet d'un anachronisme et je le trouvais drôle dans un tel contexte. Devant son insistance, je lui cédais la parole sans avoir terminé. Pernin, attaqua-t-elle, Louise. Née le 11 octobre 1973, à Nanterre. Mère italienne et père français. Nationalité française. Taille : un mètre soixante-huit. Ah bon ? Fis-je, car je la voyais plus grande. Oui. Adresse, j'habite dans le XIeme, rue Amelot, mais pas chez mes parents. Je loue un studio. Profession, je n'en ai plus depuis hier. Et elle se mit à rire. Elle trouvait tout ça très drôle. C'était un rire communicatif et je riais avec elle.
Je réalisais que j'étais bien avec une femme. Cela faisait très longtemps que ça ne m'était pas arrivé. Louise avait des beaux cheveux, une jolie peau et des seins magnifiques. Qu'elle soit dans mon lit, alors que, la veille encore, je n'aurai pu rêver d'elle, était pour moi une chose qui ne pouvait s’expliquer. Me rappelant toutes ces journées et ces nuits où j’avais pleuré l’absence d’une femme, je m’efforçais de savourer, comme il se devait, ce moment unique. Embrasse-moi, lui dis-je. Elle enfonça sa langue dans ma bouche. Ensuite, j'embrassais ses seins, son ventre et puis son sexe. Alors nous avons refait l'amour encore une fois.

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