Chapitre 1 | Chapitre 2 | Chapitre 3 | Chapitre 4 | Chapitre 5 | Chapitre 6 | Chapitre 7 | Chapitre 8 | Chapitre 9 | Chapitre 10 | Chapitre 11 | Chapitre 12 | Chapitre 13 | Chapitre 14 | Chapitre 15 | Chapitre 16 | Chapitre 17 |

Chapitre 4 : Réminiscence

Il faisait nuit. Belleville m'accueillait dans sa torpeur et son indifférence. Je sentais cette odeur particulière de fruits trop mûrs, de viande crue et d'excrément qui caractérise ce quartier à la fin de ses journées les plus chaudes et les plus actives. Belleville transpire. Les caractères chinois des enseignes lumineuses se reflétaient sur les trottoirs humides tandis que je marchais perdu dans mes pensées. Avait-il plu ? Avait-on essayé de laver Belleville ? Ce quartier est trop petit pour le monde qui y grouille durant la journée, me disais-je. Toujours plus nombreux, ils obligent ses artères trop étroites à donner plus qu'elles ne peuvent. Ce sont des gens venus de pays où jamais rien n'est mis au rebut. La notion de déchet, corollaire de celle de gaspillage, n'existe pas pour eux. Ils ne jettent jamais, ils se débarrassent comme on donne l'aumône, en pensant que d'autres seront heureux de ramasser.

Les mots qui construisaient mes pensées, tel que jeter ou se débarrasser, me ramenaient à Sandra. Mon esprit prit alors une direction que je tentais désespérément de lui interdire et me ramena quelques mois en arrière, à l'époque où nous commencions à nous éloigner. Je revoyais, comme si elle s'était déroulée la veille, une scène perdue dans ma mémoire.

Je venais de rentrer de l'hôtel et je m’étais couché à côté d'elle. J'avais tenté de l’enlacer. Elle ne voulait pas. Je m’étais ravisé et lui avais tourné le dos pour marquer ma mauvaise humeur. D’abord, j’ai pensé ignorer mon désir et m’endormir comme d'habitude, mais il était trop fort. Le geste que j'avais fait pour enlacer Sandra, puis son refus, au lieu de le faire disparaître l'avaient avivé.
Doucement, par derrière, j'ai glissé ma main sur ses hanches et sur ses fesses. Elle n'a eu aucune réaction. J'ai continué jusqu'à trouver son sexe coincé entre ses cuisses. Il était sec, et refusait de s'ouvrir sous mes caresses. Je me décidais à le mouiller. Je glissais mon corps plus bas dans les couvertures, tout en m'efforçant d'emmener Sandra à se retourner pour bien me caler entre ses jambes.
D'habitude, elle aimait que j'honore ainsi son sexe dont je m'enivrais très vite de la saveur. Ce matin-là, elle s'est brusquement redressée sur son séant et m'a dit NON. J'ai fait la tête ahurie de celui qui ne comprend rien. Pourquoi ? Elle n'avait pas envie.
Nous étions à nouveau dos à dos. Je lui ai laissé quelques minutes de répit, puis, me retournant une nouvelle fois, j'ai plaqué mon sexe contre elle pour lui imposer la force de mon désir. Alors elle m'a dit excédée, Puisque t’as décidé de m’emmerder, vas-y prends-moi !
Je l’ai prise. J’ai étreins son corps quasi inerte et, comme elle s'était couchée sur le ventre, je me suis mis sur elle et je l’ai pénétrée par derrière. Très vite, j’avais fini mon affaire. Je regrettais. Ce que j’avais eu n’était rien. Un grand Rien, vide de tout sens. Un Rien imparable et frustrant, triste aboutissement de ma concupiscence.
Sandra avait disparue dans la salle de bain avant de revenir dans la chambre. Elle pleurait. J’ai voulu m’excuser mais elle a tourné vers moi un regard chargé de reproche. Voyant ses yeux, je me suis énervé. J’en avais assez d’elle. Je lui ai dit. Pauvre victime ! Jamais satisfaite ! Toujours à te plaindre et pleurnicher !

Tandis que je marchais, je revoyais les gestes de Sandra, j'entendais ses paroles, les mots qu'elle me jetait au visage, et j'éprouvais le sentiment honteux d'avoir abuser d'elle. Ce même sentiment que j'avais voulu cacher derrière ma colère.
Pris de remords, je souffrais un peu plus et je m'engageais dans des ruelles toujours plus sombres et désertes, croyant me débarrasser ainsi de ce souvenir dont je ne me sentais pas fier.

4 Achetez le recueil de nouvelles sur amazon.fr
Bookmark and Share